CULTURE DANS MON ART

CULTURE DANS MON ART

Mon premier bain culturel a été celui de la culture religieuse chrétienne familiale. Un culte puriste protestant, sans représentations iconographiques, qui promeut l’étude littérale des textes bibliques. La recherche d’interprétations par le choix d’une traduction biblique pour vivre. Cette éducation a été ébranlé par la séparation de mes parents. Ceci a ouvert une remise en question sur mes croyances.

Dans cette recherche identitaire, j’ai eu besoin de m’exprimer. J’ai eu l’opportunité d’étudier l’art et les arts appliqués dès le lycée. C’était une nouvelle culture, la découverte de deux façons de créer en simultané. D’un côté l’art comme expression plastique et les arts appliqués dans une démarche d’allier « le beau » à « la fonction ». Avec cette pensée d’« utile », de « but », de « rendre fonctionnel », et de « répondre à un besoin » pratique. C’est être capable de justifier la création et de la rendre légitime pour l’autre. En expression plastique, on m’apprenait à me nourrir de l’histoire de l’art, de démarches artistiques et de justifier symboliquement chaque chose qui soutenait mon propos. Précisément : le choix du support, son format, mes outils, mes matériaux, mes couleurs, ma composition, et mes références artistiques. Je pensais plus que ce que je créais.

J’étais attirée par les artistes qui parlaient de spiritualité comme Kandinsky qui a écrit « Du spirituel dans l’art », Yves Klein qui parle de l’immatérialité, et Malévitch dans la suprématie avec son « Blanc sur fond blanc ». J’étais aussi impactée par le mouvement du Nouveau Réalisme parce que j’admirai les tableaux d’Armand qui cassait les instruments de musique en les composant dans un tableau, ainsi que les compressions de César. Je voyais les objets détournés impactants, la force, la déconstruction. Je voyais ces artistes rebelles, libres et à la fois cette souffrance me dérangeait.

Fallait-il être fou pour se permettre d’être un grand artiste qui marque l’histoire? Fallait-il souffrir pour créer de l’art? Les professeurs parlaient de « connaître les règles pour les contourner », de « revisiter la tradition, l’attendu, le conventionnel ». Mes projets d’études me donnaient un espace où j’exprimais symboliquement ma colère, mon envie de désobéir, de dessiner du laid dans des visages grimaçants, de l’obscène dans des corps. Ma crise d’adolescence se faisait ainsi.

Quand j’ai décidé de rechercher la paix, j’ai arrêté tout ce que je faisais d’artistique. D’une manière radicale, je n’ai pas trouvé de légitimité, ni de transition entre ma quête de paix et mon art. J’avais besoin de quitter mes codes, d’ouvrir le champs des possibles. Je suis partie étudier la Bible dans un organisme internationale de missions parce que je voulais me sentir utile dans une approche humanitaire. J’ai voyagé, fait du bénévolat puis j’ai quitté cette communauté qui me renfermait à nouveau dans un modèle de vie qui ne me convenait pas.

L’ajout d’une blessure physique chronique a créé un nouveau conflit interne et m’a obligé de prendre soin de ma santé, de mon corps, indirectement de moi. J’ai continué d’étudier de manière autonome la Bible, les langues, les différences entre les religions, les doctrines, les façons de penser et de vivre. Je voulais comprendre comment vivre ma foi sans religion, être autonome. Je cherchais un autre but que d’être artiste et je m’occupais de ma santé.

Dans mes voyages, j’ai rencontré des designers, des artistes, des personnes qui ont ouvert mon esprit sur les possibilités de vivre un équilibre entre la foi et l’art. J’ai fini par décider de reprendre petit à petit le dessin, la danse et le théâtre en allant vivre sur Paris. Je ne voulais ni être docteur en théologie, je ne voulais plus être au service de l’église, ni être une artiste chrétienne qui fait la promotion de Dieu. Lors d’un travail, j’ai rencontré un artiste qui donnait des cours de dessins qui a été un soutient pour moi. Il a été cette personne qui me faisait vivre l’accueil, la confiance et la liberté pour que je puisse me trouver dans mon art. Il ne m’a pas appris de technique, il m’a transmis un regard, une simplicité de dessiner ce que l’oeil voit et une authenticité envers soi-même. J’ai pu exposer avec lui lors d’exposition collective. Il y a quatre ans, il m’a également fait part d’un stage de mouvement d’un danseur qu’il connaissait, auquel j’ai participé. Son approche a ouvert un nouveau processus de création de mouvement depuis la sensation dans une écoute du corps. Dans cette attention du soin et de la création, j’ai rencontré une dramathérapeute qui m’a parlé de son école de formation. L’INECAT (Institut National d'Expression, de Création, d'Art et Transformation) m’a permis de vivre des ateliers qui ont continué de modeler mes processus de création. L’intervenante Marie-Sophie Madre a aussi ouvert un espace en moi où mes disciplines dialoguent. Je continue d’explorer ce que j’ai amorcé dans ces ateliers sur le toucher du papier, le son, et cette possibilité de créer depuis l’instant présent, l’envie, l’intuition, la présence à soi, sans autre but que d’être à l’écoute de ce qui se crée. Je me nourris encore de ces regards sur mon processus créatif qui ont ouvert une autorisation d’être libre, une confiance en moi. Elle avait mis à disposition des lectures d’écrits d’artistes qui m’inspirent comme Fabienne Verdier, Cy Twombly, Mark Rothko. 

Dans cet élan de confiance de mes ressentis, j’ai eu mon premier atelier à Roubaix où je poursuivais ma formation en simultanée à Paris. Cet espace dédié m'a permis de me consacrer à la peinture et la danse. L’atelier guidé par Jelena Rajak du "mouvement authentique" a été aussi un écho de mon envie de vivre ma spiritualité dans une forme de mouvement, dans l’écoute du rythme interne et externe. Mes disciplines comment à converger, à dialoguer.

Je souhaite transmettre non par la connaissance et le savoir mais par ma présence à l’autre pour qu’il trouve cet espace de paix en lui-même.

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